Xavier Dolan double Feature: Tom à la Ferme et Mommy (2013/2004)
Tom à la Ferme
(2013; Canada; Xavier Dolan) (16/04/14)
Après le décès de son mec, Tom décide de rejoindre la famille de ce dernier pour l'enterrement. Vivant dans une ferme isolée, la mère ignorait tout de l'homosexualité de son défunt fils. Ce qui n'est pas le cas de son autre fils, agriculteur violent et manipulateur.
AVIS JP: Pour son quatrième long métrage après le poignant Laurence Anyways, Xavier Dolan adapte une pièce de Michel Marc Bouchard et livre son film le plus tendu. Interprétant parfaitement le rôle éponyme, Dolan en plus de la mise en scène, de l'adaptation et du scénario signe aussi le montage et la conception des costumes. En véritable Homme-orchestre Dolan accouche d'une œuvre sombre, tendue, au suspense prégnant où l'on suit la lente et douloureuse errance d'un jeune homme qui perd ses repères face à un homme violent et torturé qui lui fait penser à son amant disparu. Petit à petit on se demande où vont pouvoir mener les tortures que lui inflige le frère de son défunt amour. Il veut renvoyer Tom, le souvenir de son frère et ses propres pulsions homosexuelles dans un placard bien fermé. Dolan fait monter la pression avec des scènes à l’apparence anodines de façon magistrale (la mère qui ouvre une boite contenant des écrits de son fils, un barman racontant à Tom un terrible souvenir). Sa mise en scène épurée par rapport à ses trois précédents longs fait mouche (à part son changement de ratio par moment dans les scènes de torture, assez vain) et fait preuve d'un réel sens cinématographique qui pour un jeune homme de 25 ans place Dolan dans la cour des grands. Musique brillante de Gabriel Yared évoquant celles que Herrmann composait pour Hitchcock, utilisée ici un peu à contre courant. On pense d'ailleurs plus précisément aux musiques que Alberto Igelsias composait pour certains films de Almodovar évoquant elles-mêmes celles de Herrmann. Une réussite.
Mommy
(2014; Canada; Xavier Dolan) (08/10/14)
Mère seule élevant un fils violent (Antoine-Olivier Pilon), ayant des troubles importants du comportement, Diane (Anne Dorval) va demander de l'aide à sa voisine Kyla (Suzanne Clément) institutrice en congés sabbatique.
AVIS JP: Mommy est le plus gros succès de Xavier Dolan (1,1 millions d'entrées/France) qui a enfin la reconnaissance du public et réussit son pari fou de sortir du cercle des initiés. Ses autres films tournaient autour des 100 000 entrées/France. Le succès est dû à une critique dithyrambique, un bouche à oreille exceptionnel et à un sujet plus accessible. En l'instance et à l'image de ses derniers films, Mommy fait preuve d'une grande maîtrise cinématographique. Tourné en 1,33 puis s'ouvrant ensuite en 1,85, ce choix de format inhabituel de manière générale mais très prisé cette année (Ida, La Chambre bleue) s'explique de façon limpide dans le film. Ce petit trio qui tente de remonter à la surface et de retrouver goût à la vie (la mère, son fils violent et l'instit d'à côté) dans un moment de bonheur tout simple part en virée et l'écran s'élargit pour une respiration momentanée entre deux crises violentes. Car oui Mommy est un film bouleversant aux émotions fortes qui ne laissera personne indifférent. Les acteurs parfaits incarnent des personnages que l'on a du mal à oublier après la projection. Anne Dorval, la mommy éponyme, épate une fois de plus. Cette actrice peut tout jouer. Entre égérie du cinéma de Dolan, figure maternelle ayant moult difficultés à élever son fils (tout comme dans le premier essai de Dolan, J'ai tué ma mère) et star hilarante du show Le Coeur a ses raisons, parodie débridée des soaps opera, Dorval nous prouve une fois de plus son excellence. Que dire de plus sur Dolan? Film après film, il fait preuve d'une grande maîtrise et en s'ouvrant au plus grand nombre arrive à imposer aux yeux de tous qu'il est un cinéaste important sur la carte du cinéma mondial.
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